
Jan Van Eyck le magicien
Quand nous pensons Renaissance, immédiatement, ce sont des peintres italiens qui nous viennent en tête. Or, il y a bien d’autres artistes dans le monde. Aujourd’hui, nous allons nous pencher sur Jan Van Eyck, un peintre flamand.
Une vie mal connue
Jan Van Eyck est né dans la première moitié des années 1390. Sa ville de naissance est traditionnellement considérée comme la ville de Maaseik située dans la province néerlandaise du Limbourg. Cette cité se trouve à une trentaine de kilomètres de Maastricht. Elle est placée entre la frontière des Pays-Bas et de la principauté de Liège. C’est un peintre flamand du début de la Renaissance est l’un des premiers représentant aux Pays-Bas. Ce portraitiste inégalé a créé plus de cent compositions sur des sujets religieux. De plus, il est le fondateur de l’art du Nord de l’Europe.
Cet homme curieux s’intéresse à beaucoup de choses, ainsi, c’est la géométrie, l’alchimie, la littérature, la théologie, la perspective et l’anatomie qui anime sa vie. De par sa technique, il deviendra l’un des plus grands peintres de son temps et sera connu au travers du monde. De plus, il ne faut pas oublier que c’est l’héritier du Maitre de Flémalle, Robert Campin, toutefois, le réaliste de Van Eyck est très différent de ce dernier.

L’art hollandais
Le peintre a fait son apprentissage auprès de son frère aîné Hubert. D’ailleurs, il travaille avec lui jusqu’en 1426. Luttant contre l’art médiéval, il préfère l’observation directe de la réalité avec un objectif, peindre le monde de manière concrète. C’est-à-dire, loin des recherches scientifiques de la perspective ou de la structure du corps humain. En effet, il ne connaît pas l’héritage de l’Antiquité.
L’art néerlandais de la première moitié du quinzième siècle se voit attribuer un nom. Bien que ce dernier soit repris de l’histoire de la musique, il détermine très précisément ce style. L’art Nova, voulant dire art nouveau utilise une connaissance indépendante intuitive et religieuse mystique du monde qui formait la base d’une nouvelle culture nord-européenne. Ainsi, ce sentiment de beauté limite angélique via la terre, le ciel, les plantes, les animaux et les gens sont devenus amplement le point de départ du développement réalisme dans l’histoire de la peinture européenne. Cet effet est encore plus ressentit dans les œuvres de Jan. Ainsi, il a un style principalement guidé par son expérience contrairement aux artistes italiens.

Une carrière prestigieuse
Jan Van Eyck commence sa carrière à La Haye dans la cours du Comte d’Hollande, Jean de Bavière. Il est peintre et valet de chambre. Cette même année, en 1422, son nom est mentionné pour la première fois dans les documents. Il travaillera à la cour jusqu’en 1425, année de la mort du Comte. Peu de temps après, Jan quitte la Hollande et s’installe en Flandre. Il sera employé à Bruges comme peintre de la cour de Philippe, duc de Bourgogne, avec tous les honneurs, privilèges, droits, bénéfices et les honoraires d’un officier ministériel. Par la suite, il s’installera à Lille.
L’Espagne et le Portugal
Entre 1426 et 1428, il part pour l’Espagne et le Portugal avec les ambassadeurs de Philippe. Là, ils y feront plusieurs missions. Premièrement, les hommes iront en Aragon pour solliciter la main d’Isabelle, fille de Jacques, Comte D’Urgell, cependant, c’est un échec. En 1428, ils sont envoyés sous la direction de Jean de Roubaix au Portugal pour demander la main d‘Isabelle, fille du roi Jean Premier. Cette fois, c’est une réussite et Jan peint deux portraits de la mariée pour les envoyer à son maître avec le projet du contrat de mariage. De plus, lorsqu’il revient en Flandre en 1430, il a un cortège de noces. Cette année, est la période de sa plus grande maturité artistique.
Tous ces voyages lui ont permis de voir différents endroits. Il y verra la péninsule ibérique, Aragon, Castille et bien d’autres. Tout au long de son parcours, le peintre notera, dessinera, fera des croquis d’éléments de paysage ainsi que de fragments d’architectures qu’il utilisera dans ses peintures. Grâce à tout ça, il étudie soigneusement les structures du monde environnant. Cela, lui permet de voir les subtilités de n’importe quel objet et de représenter des paysages comme des intérieurs de manière colorée et détaillée. Cependant, bien que ce soit le premier peintre des Pays-Bas à manifester sa paternité par une inscription « Als ich chan » (du mieux que je peux), la chronologie de l’œuvre de Jan reste extrêmement problématique.

Médiums de Jan Van Eyck
D’abord, il faut savoir que le peintre a été longtemps considéré comme l’inventeur des peintures à l’huile, or, ce n’est pas totalement vrai. En effet, les peintures à l’huile étaient déjà connues au septième siècle, mais elles n’étaient pas encore très populaires. Elles mettent longtemps à sécher et se décolorent en plus de se craqueler dans le temps. Or, en 1410, Jan trouve une formule « magique » qui rend le temps de séchage de la peinture plus rapide et permet au peintre de les appliquer en couches successives et transparentes, tel un glacis. Ainsi, il n’y avait aucune crainte de les mélanger.
De par cette technique, le peintre pouvait infiniment varier ses couleurs lui permettant d’atteindre énormément de nuances. Un mince film d’huile ressemblant à une lentille réfléchissait et absorbait la lumière indécente. Cela permet de créer un effet d’éclat interne à la peinture. Via cette technique, le médium semble briller de l’intérieur ce qui donne lieu à un sentiment de joie sublime. Un tel effet a pu être obtenu grâce à l’application de couches par couches de la peinture à l’huile sur un apprêt de gypse blanc, soigneusement poli et verni. Toutes ces nouvelles possibilités ont aidé les frères Van Eyck à créer Le Retable de Gand. Un grand monument pictural dans l’Europe du quinzième siècle.
Le Retable de Gand
Cette œuvre a été commencée vers 1422 par Hubert, cependant ce dernier meurt et c’est Jan qui lui succède en 1426 pour la terminer. Toutefois, sa création est pleine de mystères et d’événements dramatiques. Les chercheurs se posent encore la question de la paternité de la peinture. En effet, les instructions apparaissant au seizième siècle indiquaient sur le cadre qu’Hubert a commencé Le Retable et Jan l’a terminé. Cet œuvre est unique, c’est un ensemble pictural de plusieurs niveaux. Mesurant trois mètres cinquante de haut pour la partie centrale et cinq mètres de largeur dans sa forme ouverte, elle a été terminée en 1432 et mise en place dans la chapelle Saint-Jean-Baptiste aujourd’hui appelée cathédrale Saint-Bavon de Gand.

Style des œuvres
Il faut savoir que la plupart des œuvres de Jan Van Eyck sont principalement des représentations mariales et des portraits, elles sont exécutées entre 1432 et 1441. C’est le premier à faire des portraits avec l’objectif de recréer la précision de l’apparence individuelle du modèle et de l’étude analytique de la nature humaine. En effet, il fera en sorte de montrer les diverses caractéristiques et propriétés distinctives. Un témoignage de sa perspicacité et de son profond respect pour l’individualité humaine.
En 1434, il fait le portrait des époux Arnolfini, une peinture sur bois de 82,2 x 60 cm. Il est considéré comme le premier double portrait de l’histoire de l’art européen. C’est un autre chef d’œuvre indéniable de l’artiste. De plus, un autre atout de ses peintures est la représentation des pierres précieuses qui semblent réelles et brillent d’une lumière intérieure. D’ailleurs, c’est la même chose pour les métaux qu’il peint. En fait, sa peinture a un éclat luminescent. Cependant, avant d’en arriver là, il ne faut pas oublier le cœur de l’œuvre, l’esquisse. C’est le même pour toutes, un dessin souvent d’après-nature qu’il peaufine au fur et à mesure. Dans son œuvre,« Sainte Barbara », il y a un exemple frappant de l’habilité graphique qu’il a.
Cette création, est le sujet de longues disputes parmi les scientifiques. En effet, certains pensent qu’elle est terminée, d’autre qu’elle est inachevée. Les chercheurs ne sont pas parvenus à une opinion commune. Cependant, l’on sait que c’est un dessin fait à la pointe d’argent et réalisé au pinceau fin sur un fond de craie. Insérée dans un cadre de l’auteur qui contient la phrase « Jan Van Eyck m’a fait en 1437« . Au vu de cette phrase, l’on pourrait donc en déduire qu’elle est terminée, mais les doutes persistes encore.
Les environnements
Ayant un style plus raffiné et plus savant, son approche de la réalité s’appuie d’abord sur une lumière subtile génératrice d’une perception de l’espace. Ainsi, il abandonne le gothique international élégant et compliqué pour construire des espaces rigoureux et des formes fermes. Il accumule aussi des détails pittoresques. Tous les espaces crées sont le fruit de recherches et d’observations empiriques.
La profondeur est suggérée par une perspective atmosphérique, préférant la modification des couleurs. Celles-ci passent par des tons soutenus à l’avant du tableau à des tons légers voir transparents à l’arrière-plan. De plus, la maîtrise parfaite de sa technique lui permet de rendre avec précision les matières comme la fourrure, les différents tissus, les bijoux et bien d’autres que ce soit devant ou un peu plus éloigner dans l’œuvre. Tout ceci ajouté à une palette de couleurs fondées sur des harmonies précieuses et vous aurez la recette parfaite pour marquer le monde de la peinture. Il peindra toutes ces œuvres en atelier.


L’atelier de Jan Van Eyck
L’organisation et les méthodes de travail de son atelier ne se différencient guère de celles des autres. En effet, une réserve d’anciens dessins et de modèles y est constituée. Ceux-ci seront réutilisés par d’autres peintres brugeois, tout du moins après la dissolution de l’atelier. D’ailleurs, l’on peut voir un recours évident à d’anciens modèles pour certaines œuvres comme « La Vierge au chartreux » par exemple. Cette dernière a été achevée dans l’atelier de Bruges en 1442-1443 après la mort du maître.
Toutefois, aujourd’hui certaines miniatures que l’on pensait être de la main du peintre sont en fait de collaborateurs ou de successeurs qui tout comme lui faisait de la peinture sur panneau. Ils se sont basés sur des dessins existants de Jan Van Eyck. Après la mort de ce dernier en 1441, l’atelier qui ne comptait qu’un nombre restreint de peintres poursuivit ses activités pendant quelques années. Cependant, au milieu des années 1450, l’atelier est dissous quand la veuve de Jan Van Eyck, Margaret, vendit sa demeure brugeoise et quitta la ville. Nous ne savons que peu de choses sur elle, juste qu’elle avait trente-trois ans quand Jan à réalisé un portrait d’elle et qu’ensemble, ils eurent au moins un fils dont son parrain n’est nul autre que le Duc Philippe III. D’ailleurs à sa naissance, il lui a offert six bols d’argent.

Mort du peintre
Jan et sa famille vivront dans une maison à Bruges qu’ils auront acheté en 1431. Il y meurt en juillet 1441, la date de ses funérailles étant le 9 juillet. Il sera enterré dans le cimetière de l’église Saint-Donatien. Un an plus tard, ses proches ont réussi à inhumer son corps à l’intérieur de l’église prés des baptismaux.
De par son style, Jan Van Eyck a réussi à marquer l’histoire de la peinture à l’huile à la Renaissance. En effet, il avait une technique presque parfaite de son médium ce qui lui a permis de créer des œuvres splendides. De plus, c’était un peintre apprécié à la cour de Bourgogne, ce qui le mènera à une gloire européenne. Via l’artiste lui-même et ses peintures, ce sont une humilité et une dignité inhérente qui se résumaient en une devise « comme je peux ».